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La plus vaste entreprise scientifique ayant jamais existé
À la lecture de ces nombreux ouvrages de vulgarisation consacrés au changement climatique, souvent d’une remarquable qualité, un constat s’impose : notre époque est témoin d’une entreprise scientifique unique de par son ampleur et son contenu. Sont en effet impliqués des milliers de chercheurs et scientifiques, contributeurs directs ou relecteurs des rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), et des dizaines de milliers d’autres sont des contributeurs indirects par leurs travaux et publications sans lesquels ces rapports ne pourraient exister. Les disciplines scientifiques impliquées sont nombreuses : physique, chimie, écologie, économie, océanologie, sociologie, sciences politiques, géographie, et bien d’autres. L’ensemble des continents et des pays sont représentés par leurs meilleurs scientifiques, qui mènent depuis maintenant plusieurs décennies ce projet scientifique qui a pour charge de mesurer, prédire et anticiper le changement climatique et ses effets, et d’en déterminer les causes. Au-delà de la quantité d’informations scientifiques accumulées et analysées sur plus d’un siècle par ces dizaines de milliers de chercheurs, la rigueur, la prudence, la progressivité, la qualité du travail scientifique fourni sont remarquables.
Comment expliquer l’étendue de cette entreprise sans nulle autre pareille ? Parce que les enjeux n’ont jamais été aussi grands. Les perspectives écologiques, économiques et sociales sont alarmantes et il n’est aujourd’hui plus possible de fermer les yeux. Sans l’envergure et la qualité sans égales de cette entreprise scientifique, sans nul doute que la prise de conscience n’aurait pas été aussi large par l’ensemble de la société : scientifiques, citoyens et politiques ont maintenant pleinement conscience que le climat terrestre a fortement et irréversiblement changé en quelques décennies, qu’il continuera à changer dans des proportions identiques dans les décennies à venir, que nous en vivons déjà les conséquences et que nous devons anticiper au mieux celles à venir. Le développement et la qualité de ce projet scientifique se reflètent dans la plupart des livres de vulgarisation sur le thème du changement climatique. En particulier, plusieurs ouvrages distillent les rapports du GIEC pour rendre cette montagne d’informations accessibles au grand public, afin de jouer pleinement leur rôle de passerelles entre recherche académique et quotidien des citoyens, révélant les interactions subtiles entre notre climat et nos sociétés. L’étendue des savoirs nécessaires pour aborder ce thème est bien mise en évidence dans ces ouvrages de vulgarisation puisqu’on y parle tout autant de thermodynamique, de propriétés réfléchissantes des sols, des cycles écologiques, de l’histoire de l’économie ou des risques sociaux et politiques à anticiper.
Bien entendu, un tel consensus scientifique joue comme un appel d’air et suscite des réactions négationnistes, de plus en plus rares mais toujours présentes aussi parmi les ouvrages de vulgarisation scientifique. Ce catalogue vous en présentera quelques exemples aisément identifiables, et vous apportera quelques éléments critiques quant à leur évaluation.
De manière plus intéressante, bien que tous les ouvrages présentés et critiqués dans ce catalogue aient pour thème « le changement climatique », leur lecture vous procurera bien d’autres informations et sources de satisfaction. Car cela est bien de science et de démarche scientifique dont il est question dans tous ces ouvrages (ou presque !), certes appliquées dans un champ particulier, mais de science en général tout de même. Les sciences appliquées à l’étude du changement climatique sont un excellent prétexte pour réfléchir aux rôles des données et des modèles, se questionner sur le concept d’incertitudes et de risques, sur la différence entre probabilités et statistiques, ou sur le rôle du scientifique dans la société, et les drôles d’interactions entre actions politiques et science, qui parfois font froid dans le dos : Edouard Philippe (alors premier ministre) a par exemple déclaré au cours d’une conversation sur le changement climatique : « Ecoutez, moi, en tant que responsable politique, je ne vois pas comment il est possible de tenir compte des sciences » (propos relatés par le journaliste Dominique BOURG, cités dans le livre « Climat », de Jean JOUZEL et Hervé LE TREUT). Les responsables politiques français feraient bien de lire certains des ouvrages.
Sylvain BILLIARD
Professeur Université de Lille